Pèlerinage du pain à Montréal

Pèlerinage du pain à Montréal

«Nous avons choisi tout d’abord le type de pain que nous voulions obtenir, dit Martin Falardeau, et ensuite nous avons fait le parcours inverse pour établir les manières de faire ce pain.» À La Femme et le boulanger, l’expérience avait été différente: durant quatre années, le boulanger avait dû investir toujours plus de temps de travail pour compenser les limites technologiques (four, réfrigération) qu’il ne pouvait dépasser. Cela l’avait épuisé.

L’innovation et la clé de cette approche étaient fondées sur la science des blés et des farines. En choisissant le type de blé idéal pour le genre de pain que les boulangers fondateurs souhaitaient accomplir, ils établirent un réseau de liens avec des agriculteurs québécois et une minoterie régionale. C’est ainsi qu’aujourd’hui, la majorité des pains du Pain dans les voiles est fabriquée à partir de farines issues de blés québécois et moulues par les Moulins de Soulanges, en Montérégie. Les blés sont issus de l’Agriculture raisonnée (une marque de commerce déposée des Moulins de Soulanges), ce qui signifie que pour cultiver ces blés aucun pesticide n’a été employé. Le cahier des charges est élaboré dans ce cas-ci par l’entreprise elle-même, en comparaison des cahiers des charges des organismes de certification biologique qui eux sont élaborés indépendamment des entreprises. L’avantage de l’Agriculture raisonnée réside toutefois dans son accessibilité pour des agriculteurs fort habitués à l’agriculture conventionnelle employant de nombreux intrants chimiques. Robert Beauchemin, fondateur et directeur des Moulins de Soulange, disait en entrevue à Radio-Canada, que c’est grâce au modèle médian de l’Agriculture raisonnée que des agriculteurs ont modifié leurs habitudes d’agriculture et que certains d’entre eux sont même passés au biologique.

En achetant toutes les récoltes de blé, le Pain dans les voiles s’offre un blé dont il connait les propriétés et qui sera constant toute l’année. Cela permet alors de miser sur la qualité du produit fini et d’encourager un circuit relativement court de production et de transformation (cette filière blé-farine-pain est entièrement québécoise). Pour Martin Falardeau, il est beaucoup plus valorisant en tant que boulanger de panifier avec des blés québécois qu’avec des blés biologiques provenant des prairies canadiennes, voire de l’étranger.

Pour la baguette tradition, les boulangers font une exception et utilisent une farine d’origine française, laquelle permet de développer une fermentation au levain idéale (sans arrière-goût aigre, spécifie Martin Falardeau) et d’obtenir un contraste mie-croûte à leur goût. Cette baguette affiche un alvéolage irrégulier, une mie avec de grandes bulles qui se mâche agréablement. Les arômes de la mie et de la croûte se dévoilent progressivement, sans provoquer une attaque au palais. Mais les flaveurs persistent longtemps après la dernière bouchée. La croûte craque mais n’a pas à être déchirée. C’est un pain blanc, certes, mais il réconforte.

Le voilier que les partenaires du Pain dans la voile construisaient a coulé avant son premier voyage. De nouveaux voiliers sont en chantier. À l’origine du Pain dans les voiles, une passion pour la voile et la quête d’un métier qui permettrait à ses artisans de lever les voiles. Faire du pain pour créer un mode de vie.

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